Le média totalement #FOOD

Wilem Oulac, jeune, chef et exemplaire

Actualités, Portraits | 0 commentaires

Posté par Communication

3 juillet 2022

Si la maturité se gagne au fil des ans, alors une année en vaut deux pour le chef Wilem Oulac ! Le Guadeloupéen, âgé de 21 ans, impressionne par l’analyse de son parcours, sa vision réfléchie de son métier et des étapes qu’il lui reste à franchir pour réaliser son rêve de devenir Meilleur Ouvrier de France, titre ô combien recherché dans le monde culinaire. Rencontre avec ce chef qui a tout d’un grand.

Une histoire de transmission

« À la maison, il y avait un petit livre de recettes d’ici et d’ailleurs que ma grand-mère – que je n’ai pas connue – a rédigé. Ma mère me racontait les différentes recettes qu’elles faisaient ensemble lorsque toute la famille était invitée à déjeuner. Elle m’a transmis ainsi la passion de ma grand-mère pour la cuisine. J’avais toujours en tête ce petit ouvrage qu’elle ne voulait pas me donner, car elle avait peur que je l’abîme ou le perde. De temps en temps, elle me dévoilait une recette, ce qui constituait une sorte d’aventure pour moi. 

Wilem Oulac, un exemple pour la jeunesse guadeloupéenne

Depuis l’âge de 14 ans, le chef Wilem Oulac a tout mis en œuvre pour apprendre et exercer le métier de cuisinier. Son parcours, marqué par quelques embûches et beaucoup de détermination, le jeune homme le raconte, sans fards.

Wilem Oulac : À la fin de ma seconde au lycée des Droits de l’Homme à Petit-Bourg, mon frère m’a demandé ce que je désirais vraiment faire. Je voulais exercer un métier technique, c’est-à-dire travailler avec mes mains. J’ai toujours été attiré par la cuisine. Cependant, ma mère est comptable, mon oncle professeur de mathématiques, ma tante, directrice d’école. La cuisine était vue comme une voie de garage et ma mère n’était donc pas enchantée à l’idée que je choisisse ce domaine. Malgré tout, je me suis inscrit en CAP cuisine à l’Université Régionale des Métiers et de l’Artisanat (URMA) à Saint-Claude.

Pour effectuer la formation, je devais trouver une entreprise pour mon apprentissage. J’ai rédigé mes premiers CV et lettres de motivation, établi une liste de restaurants avec le type de restauration, les horaires et les numéros de téléphone. Ensuite, j’ai appelé pour demander des rendez-vous, obtenu plusieurs propositions et choisi Le Tourniquet à Baie-Mahault.

Comment s’est déroulée cette première expérience professionnelle en cuisine, alors que vous aviez 14 ans ?

W.O. : Cela n’a pas toujours été évident. Comme j’habitais à Goyave, le matin, je prenais deux bus pour aller à Jarry. Cela faisait 7 euros aller/retour par jour. De plus, le chef nous mettait beaucoup de pression. Le côté dur de la cuisine est une manière de te forger et d’avancer. Toutefois, j’ai aimé ressentir cette « pulsation » au moment où le chef annonce la commande et que tout le monde répond « oui, chef » en chœur. Je me suis dit : il faut que j’apprenne toutes les cuisines du monde, que je parvienne à faire ce métier, car il est trop beau ! Il te permet de voyager, de rencontrer du monde, de faire des découvertes de saveurs. C’est magique ! Quand tu vois les gens charmés, éblouis par certains plats, c’est exceptionnel.

Vous avez changé de restaurant durant votre CAP cuisine. Pour quelles raisons ?

W.O. : Je n’aime pas rester au même endroit. Je voulais découvrir plusieurs chefs et types de cuisine. Après Le Tourniquet, j’ai rejoint L’Authentic à Baie-Mahault. J’y ai vécu pas mal d’aventures… (sourires) Le fait d’avoir commencé comme apprenti à 14 ans, j’ai très vite gagné en maturité. Néanmoins, j’étais encore assez dispersé, il fallait que je continue d’apprendre. Je suis donc parti à L’Epicure, un restaurant gastronomique situé à Jarry, pour travailler avec le chef Mathieu. Mon évolution a explosé. Comme il était jeune, nous avions une relation particulière, il m’a fait confiance et m’a appris énormément. J’ai travaillé avec des chefs très durs, mais j’ai acquis beaucoup d’expérience, de compétences.

Vous avez enchaîné par un Brevet professionnel, spécialité Arts de la cuisine, obtenu en 2019. Racontez-nous.

W.O. : J’ai travaillé dans deux restaurants. D’abord le Sauzens, avec le chef Laurent. Puis, Le Vancliff où j’ai eu beaucoup plus de responsabilités, malgré mon jeune âge. Je gérais la partie desserts, j’étais très créatif, je m’amusais.

Durant mon BP, j’ai eu la chance de partir à Lyon, où a notamment travaillé Paul Bocuse, le pape de la gastronomie française. J’y ai découvert une nouvelle vision de la cuisine. J’ai rencontré des Meilleurs Ouvriers de France, j’ai assisté au concours du Bocuse d’or. Mes yeux étaient en effervescence, je voyais les étoiles ! Je me suis dit : il faut que je devienne très vite chef, que j’apprenne plus vite que les autres.

Pourquoi avoir choisi de rester en Guadeloupe ?

W.O. : J’ai envisagé de partir à Lyon, mais j’ai préféré rester pour des raisons familiales. Ensuite, j’ai rencontré deux entrepreneurs guadeloupéens, Kannan Arumaidurai et Thierry Reynaud, qui m’ont proposé de devenir le chef du restaurant qu’ils reprenaient. J’avais 19 ans et certes un beau parcours, mais j’ai été très étonné qu’ils me demandent de gérer la cuisine d’un restaurant de plus de 130 couverts. Pourtant, j’ai accepté ! Je me suis retrouvé dans un restaurant qui brassait énormément de monde, avec des kilos de marchandises à commander. La cuisine ne correspondait à ce que j’avais fait auparavant. J’ai pris deux semaines pour observer, comprendre et ensuite, j’ai commencé à travailler en juillet 2019.

Comment êtes-vous parvenu à relever ce qui apparaissait comme un réel challenge ? 

W.O. : Au début, je faisais des journées de 7h à 23h. Il fallait que je sache tout faire et que je le fasse mieux, pour gagner le respect des membres de mon équipe, qui étaient bien plus âgés que moi. Cela n’a pas été facile au début. Il m’a fallu faire des plannings, des fiches techniques, un organigramme. C’était un autre monde, une nouvelle façon de voir la cuisine ! J’ai vite appris en matière de gestion du personnel. C’était également la première fois que je devais passer des commandes, gérer des fournisseurs. Je me suis découvert un talent pour la négociation. J’ai aussi changé la carte, trois fois depuis mon arrivée.

Quelles sont vos satisfactions ?

W.O. : Mes patrons m’ont beaucoup aidé, poussé, mis en avant. De plus, les cuisiniers ont vu ce que je valais, ma motivation, et me font confiance. Depuis septembre 2020, j’ai vraiment le sentiment que cela tourne. Des anciens chefs m’ont même félicité.

Au TK House, j’ai intégré ma touche sur la carte, dans le dressage des mets avec de multiples petites idées, dans la découpe des viandes pour un meilleur rendu dans l’assiette. Les desserts sont tous faits maison. Jusqu’à présent, cela a été une belle expérience.

Propos recueillis par Mylène Colmar

Wilem Oulac, sur l’importance de la technique et de l’entraînement : « Que tu sois fatigué, sous pression, malade, quand tu maîtrises, tu auras toujours le même geste, parfait. Pour cela, il faut s’entraîner tout le temps ».

2 – Wilem Oulac : « J’aime être dans ma cuisine, dans mon petit cocon, pour explorer… Il y a une transmission d’énergie entre moi, le cuisinier, et les produits que j’utilise. Il faut donc cuisiner avec passion ».

3– Escale en guadeloupe par la revisite du gombo (entrée).

Photos Daniel Dabriou

Contribuez

Nous sommes ravis des milliers de félicitiations et encouragaements pour nos différents supports, mais nous avons aussi besoin de fonds pour poursuivre le développement de Foodîles.

Nous avons besoin de vous. Nous comptons sur vous.

Pin It on Pinterest

Share This